Gobilles-Volant-Cachons

Les gobilles

Les manières de jouer aux gobilles sont aussi nombreuses que les étoiles du ciel. De la la trime au triangle et à la ranche, en passant par la bloquette, le serpent et la curse, il y a des milliers de combinaisons.

Le jeu le plus simple et le plus économique est la ranche. Vous faites une ligne de gobilles, et le gone que le déguillage a désigné, tire, de loin, avec une agathe sur la ranche. Il fait briscaille sur toutes les gobilles qui sont à gauche de celle qu'il a poquée.

La pyramide est un jeu coûteux. On y perd gros. Il s'agit de faire sortir d'un rond, en les poquant du dehors, des gobilles montées en pyramide au milieu.

Les jeux les plus savants sont encore ceux qui ont un pot pour centre. La sanction de la partie est simplement un coup d'ognes. Cela apprend à supporter la douleur. Etant à cacaboson, le perdant pique verticalement sa main sur le sol, le médius et l'annulaire écarté et retenant une gobille. Un autre gone, placé devant, cherche à poquer cette gobille avec la sienne. Souvent il poque vos doigts, et vous êtes tenté de faire : " Aie ! ". La fierté vous empêche de le faire et vous recevez les ognes sans sourciller, en quoi ce jeu vous prépare à la vie. " Recevoir les ognes sans broncher, tout est là ", a dit Zénon le stoîcien.

Le volant

Dès le début des vacances, on s'occupe de la confection du volant. On achète des cannes bien creuses, chez les marchands d'engins de pêche ; on les fend, les unes en deux, les autres en quatre. C'est pour la charpente du volant. Les cannes fendues en deux font la croix sur laquelle seront fixées à l'aide de ficelles, les autre pièces du bati, composées de cannes fendues en quatre. La tige la plus solide doit être l'épine, qui soutien la charpente, au milieu dans le sens de la longueur. Le volant est carré, ou en losange. On colle sur le bâti du papier glacé très léger, orné d'images. La queue, qui assure en l'air l'équillibre, est bien plus longue que le volant. Elle est faite de papillottes de papier de couleur, fixés à une ficelle.

La corde par laquelle on retiendra le volant doit être solide et très longue. Elle se fixe devant l'engin, au milieu, attachée de travers le papier au croisement de l'épine et de la canne de traverse.

Pour lancer le volant en l'air, aller au Clos Jouve, à Montessuy ou au Grand Camp. Posez le à terre et, tenant la corde, courez d'autant plus vite que le vent sera plus faible.

Tenez toujours le volant face au vent, il se soutient en l'air par la force de la résistance qu'il rencontre.

Le Glaudius qui est aviateur, dit qu'en cela le volant a été le précurseur de l'avion.

Le père Mathevet, homme profond, qui avait trente ans de mariage, disait lui : " Le Volant, que tomba aussitôt que le vent ne lui fait plus contre, est l'image de la colère des colombes ".

Y paraît que ce jeu des gones est connu sous le vocable cerf-volant, que viendrait de l'occitan sèrp-volanta " serpent volant ". C'est ce qui se dit du côté de Marseille que sont pas des gones simples comme par chez nous ; mêmement que ce serait à cause des chinois qui en seraient les premiers créateurs et que notre volant y leur faisait penser à un serpent ou dragon volant. Tout ça c'est des gognandises car l'origine viendrait d'un peuple de pêcheurs. Or c'est bien avec des bambous de canne à pêche que nos gones y fabriquent l'engin... pas vrai ! 

 

Les cachons

Quand est venu le temps des fruits, on a fait collection de cachons. Ceux de l'abricot sont les plus utiles. On en fait des sifflets en frottant, sur une pièrre mouillée de salive, les deux face du cachon jusqu'à ce qu'elles soient uses et percées. On enlève l'amande, et en soufflant dans les trous de delà, on peut jouer l'ouverture de Tannhauser.

Ceux qui ne sont pas musiciens gardent les cachons pour jouer au cornet. On se met à cacaboson devant le cornet de descente des eaux pluviales d'une maison. Du pouce et de l'index, on lance un cachon dans l'embouchure. Le cachon redescend sur la cadette (trottoir). Alors, le gone qui vient après lance à son tour son cachon. Si en retombant, il poque le votre, le gone enlève les deux, sinon il laisse l'aubaine à celui qui viendra après. 

Au jeu ordinaire, on ne gagne que le cachon poqué par le votre, mais à cha-tant-qui-en-tombe, on fait briscaille, c'est àdire que l'on ramasse tout.

La décadence du jeu de cachon tient à deux causes : 1e aux arrêtés du maire qui oblige les propriétaires à faire aller les conduits dans les caniveaux, ce qui a suprimé les cornets ; 2e aux chemins de fer qui favorisent l'exportation des fruits, ce qui fait qu'un abricot est, au jour d'aujourd'hui, aussi rare à Lyon qu'un louis d'or.

De plus, comme tout est falsifié à présent, il se vend dit-on, beaucoup d'abricots sans cachons.

Ce texte date de 1923, étonnant non !